samedi, novembre 11, 2006

(Interview) Emmanuelle Villard


Après avoir improvisé une brève présentation de l'artiste, celle-ci s'est lancée, dans notre rendez-vous d'hier que j'avais commandité, dans un quasi monologue - non dénué de sens et d'intérêt - où même ma grand-mère n'aurait pu en placer une (N.B. : je l'adore). C'est pourquoi, Emmanuelle Villard a répondu à mes questions sans que j'aie eu l'opportunité de lui poser. Première interview donc où les questions vont venir se greffer sur le discours après coup.
Je voulais lui demander, même si j'ai abordé ce thème dès l'introduction, si son travail était décoratif, si ce mot était péjoratif pour elle. J'ai bien vu dans ses yeux un sursaut à l'entente de ces mots, et en effet son histoire personnelle, à savoir son accident de voiture, est directement liée au processus de taches utilisé, simple mais découlant d'un trauma, le corps ne fonctionnant pas en symbiose avec l'esprit. Que cela ne déplaise aux médisants, il y a donc bien un discours profond derrière son oeuvre, même si j'ai un doute sur l'utilité d'une production sérielle malgré le caractère unique de chaque pièce.
Cependant, les notions de "beau", "moche", "joli", reviennent souvent dans son discours, d'où l'intérêt sûrement d'évoquer un certain côté de fascination de l'esthétique pur, du "beau" sans aller jusqu'à une auto-suffisance bourgeoise.
La question du discours apparaît alors primordial. Ce qui était au départ caché par une certaine autarcie - le discours - se retrouve de plus en plus mis en avant. En effet, Emmanuelle Villard essaie à travers ces dernières expositions d'accompagner le spectateur, par le biais d'un discours associé à une production instinctive. Emmanuelle Villard ressent donc de plus en plus le besoin de mise en scète du discours, et l'exposition à la criée par exemple est certainement née de l'inconscient de l'artiste d'expectorer son passage du studio étroit à l'atelier immense.
Côté marché, Emmanuelle Villard n'a semble-t-il aucun problème, même si l'on voit qu'il lui est difficile de se séparer de ses oeuvres (elle voudrait dans un monde utopique ne jamais les vendre : je suis pareil mais moi j'y arrive) et c'est vrai que ces maquereaux que sont les galeristes et les collectionneurs lui laissent un goût âpre dans la gorge.
En rencontrant Emmanuelle Villard, j'ai compris pourquoi son travail prend de plus en plus un côté Jet Set, stress et paillettes. Même si elle n'a que rarement dégusté du Sevruga et qu'elle y trouve juste un côté esthétique, j'ai cru comprendre que le "monde de la nuit" (cf. : bas résille), les soirées mondaines, l'ont toujours attirée, et que ses oeuvres sont certainement l'expression la plus forte d'une volonté profonde d'intrusion dans ce monde si fermé de l'art, fait de réseaux. Une façon de dire "ça y est j'y suis !".
Enfin, saluons la qualité de la Villa Arson dont elle a fait l'éloge et l'on peut penser qu'elle n'y a pas été que pour la cafét', car c'est un lieu marquant de ces dernières années, avec notamment des personnalités comme Jean-Luc Verna ou Noël Dolla.
Un grand merci donc à Emmanuelle Villard qui nous a présenté son travail qu'elle veut très intimiste de façon impudique. Je me suis reconnu sur beaucoup de points (peinture jusque dans les chaussettes dans ma chambre qui me sert d'atelier, pratiques picturales similaires à la recherche constante de process).
Bernard Frize et Emmanuelle Villard sont donc bien "mes père et mère picturaux" et se retrouver à ce point devant un miroir est très troublant.
Merci enfin à toute l'énergie qu'elle nous a donnée.
Afin de mettre des images sur ces propos, je vous conseille son site : www.emmanuellevillard.com

Antoine DIETZI a.k.a kinder

dimanche, novembre 05, 2006

FIAC 2006
La pastille rouge contre-attaque
Au lendemain de la FIAC 2006 qui vient de fermer ses portes, un seul constat fait l'unanimité : le marché de l'art se porte bien, très bien même. En effet, la multiplicité inquiétante des foires internationales ne semble que satisfaire l'envolée du marché. C'est alors que l'artiste devient homme d'affaires, le galeriste "maquereau" (ce qu'il a toujours été) et le collectionneur chasseur de prime, investisseur en bourse ... La spéculation fait rage, et les nouveaux riches comme on les appelle viennent blanchir leur argent plus blanc que blanc. Malgré la multiplicité des foires "off" présentant un intérêt certain, l'essentiel se joue au Grand Palais, qui après la Farce de l'Art, ouvre à nouveau ses portes pour la Force de l'OR. Toujours le même constat de mauvais investissement des lieux, cette fois-ci tout de même plus légitime. Il s'agit avant tout d'une foire dans tous les sens du terme. Après avoir apprivoisé ce lieu hostile en ayant fait deux à trois tours de Palais en vain, l'on revient sur ces furtifs coups de coeur (qui furent rares pour ma part).
Impossible de ne pas parler dans un premier temps de la factory Emmanuel Perrotin dont la répputation n'est plus à faire, d'où la déception énorme qui fut mienne à la vision d'un Bernard Frize très moyen en comparaison de son immense talent sur la recherche de processus picturaux. J'étais venu uniquement pour me confronter à un de ses coups d'éclat qui sont nombreux, je repars déçu sur ce point. Mais la griffe incisive de Perrotin se retrouve tout de même via le porc tatoué du Christ dont la présence met mal à l'aise même un non croyant. De plus, par les temps qui courrent ... Malgré le plaisir et la chance de pouvoir se confronter de près à des Fontana, des Klein ou autres Warholl, force est de constater que ce ne sont pas leurs plus belles pièces et même si le marché fait des choux gras de leurs ventes, on a tout de même l'impression d'être dans une solderie de fin d'année où l'on vend les "invendus" aux collectionneurs assoifés d'investissement. A noter aussi le jubilée Tony Cragg dont les prix sont en osmose avec le marché même si son travail est beaucoup moins incisif qu'à ses débuts. L'homme s'est labellisé.

Le salut de mon investissement de 10 euros viendra par la présentation d'oeuvres des galeries françaises qui ont, selon moi, surplombé les chefs américains ou anglais. Saluons le travail d'Antoine Perrot à la fois subtil, ironique de ce qu'il appelle des ready made color, malgré le regret de ne pas avoir vu la colonne de Brancusi faite d'éponges.



Enfin, le prix Marcel Duchamp, d'un niveau d'ensemble très correct, a couronné le travail remarquable comestiblo-esthétique-cannibale de Philippe Mayaux, qui nous fait entrer totalement dans son univers étrange, fantasmagorique, proche de l'esprit d'un Salvador Dali. Et désolé (ou bravo ?) pour Adel Abdessemed, qui fut pourtant le vrai gagnant de la FIAC car son acheteur est son "altesse" Monsieur Pinault, montant ainsi la cote de l'artiste à son apogée. Oeuvre qui n'était pourtant qu'une "pâle" copie de l'oeuvre monumentale et collective de banlieusards de Clichy, Grigny ou autres banlieues ... Que dire de plus ??? Jusque là tout va bien ... ("La haine")

ANTOINE DIETZI a.k.a Kinder